Episode 7 : La Saga de la Compagnie du Canal

Nous sommes en 2004, nous vivons sur l’île Sainte-Marie à Madagascar. Nous gérons l’hôtel « Boraha-Village » et depuis deux ans notre embarcation « Cap Sainte-Marie », nous sert de l’apport de nombreux touristes, dont nous assurons la traversée vers l’île.

Pourquoi cette nouvelle activité ?

« Cap sainte Marie » qui effectue au moins une traversée quotidienne aller et retour, entre Soanierana Ivongo et Sainte-Marie récupère les touristes à Tamatave (Toamasina), puis les véhicule, grâce à nos deux bus, sur 160 kilomètres sur la RN5, qui longe la côte Est vers le Nord. Ces touristes ont tous, préalablement atterrit à l’aéroport international d’Antananarivo, suite à un vol en provenance de l’Europe et se sont donc rendus à Tamatave (Toamasina) ou nous les prenons en charge.

Dès lors, se pose une question simple. Pourquoi ne pas transporter ces clients, déjà captés commercialement, d’Antanarivo à Toamasina. Question simple, réponse simple : Il faut le faire, et cela d’autant plus que ce voyage routier de 350 kilomètres, comporte deux curiosités, très intéressantes.

A mi-chemin, la réserve du Périnet, dans le parc National d’Andassibé-Mantadio, offre la découverte d’une des rares forêts primaires de Madagascar, et la rencontre certaine, avec le lémurien, ce primate endémique et terriblement amusant, de la grande île rouge.

L’incroyable zone lacustre du Canal des Pangalanes, qui longe la côte Est de Madagascar, de Farfangana au sud à Foulpointe au nord.  Entre 1900 et 1950, le général français, Joseph Gallieni, entreprit de relier les nombreux lacs, alimentés par nombre de rivières, en construisant un canal. Il a ainsi créé, sur 700 kilomètres, une nouvelle voie navigable, comportant des paysages sauvages et lacustres à couper le souffle. Il est incroyable que cette curiosité exceptionnelle soit, encore en 2004, inexploitée de manière touristique !

Ces deux constats, l’existence de la réserve du Périnet et la curiosité du Canal des Pangalanes, m’ont servi d’une apparition évidente : plus qu’un simple transfert routier de quelques heures, proposons à nos clients un véritable circuit de quatre ou cinq jours, de découverte, sur la base de ces deux sites sauvages et exceptionnels.  

Un objectif, c’est un rêve avec une date limite :

Récupérer nos clients atterris à Antananarivo, leurs proposer, et pourquoi pas leur vendre, un circuit sur la côte Est jusqu’à Tamatave. De là, les véhiculer jusqu’à Soanierana Ivongo, puis en bateau jusqu’à Sainte-Marie, pour leur séjour à Boraha-Village. N’est-ce pas là un programme des plus sympa !

C’est à cela que je vais m’atteler en créant « La Compagnie du Canal ».

Côté circuit : Un accord avec un hôtel de qualité dans la réserve d’Andassibé, (Hôtel Vakona), un bureau d’embarquement à Manambato sur le Canal des Pangalanes, un accord avec l’hôtel « Les Panagalnes » à Ankany Nofy (à mi-route sur le canal), un bureau au port fluvial de Tamatave, feront l’affaire.

Côté matériel : Deux véhicules Toyota 4X4 au départ de Tananarive, deux bateaux Yamaha XMC24 spécialement aménagés pour la navigation sur le canal, deux containers sécurisés de stockage du carburant sur le circuit, suffiront. 

Côté équipe :  Quatre marins bien formés, un mécanicien et une secrétaire pour les réservations et l’administration ; l’équipe est complète.

De mon côté : Je réalise la mise en place de cette organisation et son financement. La commercialisation auprès des nombreuses agences de voyages d’Antananarivo, la formation de l’équipe, la mise en ligne d’un site de promotion et de réservation, et enfin et surtout, le contrôle de la qualité du service en général, et du respect des procédures de sécurité.

C’est ainsi, qu’en Septembre 2004 naissait « La Compagnie du Canal ».

En 2005, nous avons ainsi transporté, et j’espère amusé, quelques 800 clients, avec une progression constante les années suivantes.
Nous pensions, à force d’habitude de notre travail quotidien, que nous faisions du transport, mais nos voyageurs nous rappelaient sans cesse, l’aventure qu’il vivaient, sur ce parcours vierge de civilisation. Cela m’a conduit à engager un jeune guide malgache, Jaona, qui faisait merveille, avec ces commentaires et ses connaissances étonnantes, de mille et une histoires, qui agrémentaient le parcours. C’était un véritable conteur. 

De nombreuses situations cocasses ou anecdotes ont agrémenté notre quotidien laborieux. Des rencontres surprenantes avec la population côtière des nombreux petits villages du bord du canal, quelques crocodiles surpris çà et là, mais moins que des moustiques. Quelques opérations de transports sanitaires de malades isolés, mais dans l’urgence et beaucoup de rires d’enfants étonnés, face à l’objectif photo des touristes.

Un jour de Septembre, nous transportions Michel et Louise, un couple de la quarantaine, qui avait certainement déjà entamé leur capital amoureux, à observer l’intérêt que Louise portait à un de nos jeune marin. En visite d’un petit village lacustre et par défaut de comptage, nous avons oublié Michel, pour ne nous en apercevoir que deux heures plus tard. De retour sur place, Michel qui avait subi un « coup de foudre » pour Soa, la petite fille du chef du village, décida de rester sur place, malgré notre insistance.
Michel était sculpteur sur métal, et sur un futur passage nous lui avons déposé un chalumeau de soudure et du gaz, il semblait heureux. Si vous passez vers Ampanakary, vous observerez un totem sculpté en bordure du canal, portant la mention « Merci la Compagnie ». Vous connaîtrez l’histoire.

Comme les autres affaires, j’ai cédé celle-là, à notre départ, à un parisien qui avait toujours une pipe à la bouche. Je ne me rappelle que de son surnom « Mortimer ». A-t-il survécu aux dents des crocodiles ?

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