Sérénité chinoise ?

Copier, Coller

Cela fait fort longtemps que les Chinois volent ailleurs ce qu’ils n’ont pas chez eux.
Certes, ils ne sont pas les seuls à pratiquer l’espionnage industriel.
Mais, comme pour bien d’autre chose, ils ont l’art de la pratique institutionnalisée, à grande échelle.
Institutionnalisée parce qu’encouragée et promue par le gouvernement.
A grande échelle par le grand nombre d’espions opérants, qui pratiquent dans tous les secteurs, dans tous les domaines et en tous lieux.

Le Chinois observe en silence, puis se glisse discrètement dans le système, participant parfois même activement, à l’élaboration du procédé.
Il vous laisse le brevet et n’exporte que le savoir, qu’il va ensuite reproduire chez lui, malgré les carences de son outil de production.
Les ingénieurs entrent alors en scène pour combler les défauts de production, améliorer le produit et surtout l’industrialiser à grande échelle et à bas prix.
Il ne lui reste plus qu’à vous revendre facilement le produit ou le service que vous souhaitez peu couteux.
C’est le champion du copier-coller, et ça marche !

Leur impressionnante réussite tient à leurs qualités naturelles : la discrétion, la patiente, l’observation, et l’unicité de leur objectif limité à la seule notion de profit, à travers l’expansion économique.
Ces qualités font merveilles dans le monde occidental, car les valeurs morales d’ouverture et de partage de nos démocraties, facilitent le procédé. Ces mêmes valeurs que les Chinois considèrent comme des faiblesses naïves, qui servent leur intérêt.

Un système qui fonctionne

La Chine est une « République » qui applique un projet politique unique en son genre, atypique et original.

•Unique, car son système qui associe le communisme et le capitalisme est effectivement unique au monde.

• Atypique car on ne peut pas le classer puisqu’ il ne correspond à aucun autre type de système politique.

• Original, car il associe deux philosophies contradictoires, voir opposées.

En effet, le communisme est un mode d’organisation basé sur l’abolition de la propriété privée des moyens de production au profit de la propriété collective et qui vise l’abolition des classes sociales, alors que le capitalisme se caractérise par la propriété privée des moyens de production qui n’appartiennent pas aux travailleurs et génère des inégalités.
L’idéologie communiste, telle que conçue initialement, est cependant quelque peu dévoyée. En effet, le partage au profit du peuple porte surtout sur le partage du travail et non pas sur le capital, réservé aux entreprises, sous le contrôle du pouvoir.

Bien qu’original, ce système politique s’est montré, jusqu’à présent, particulièrement performant économiquement car il permet d’associer la paix sociale, imposée à la population par les principes du communisme, soit par adhésion, soit par contrainte, avec le développement de l’économie de marché, issue du monde capitaliste.

Pour être performant, ce système hybride ne peut être dirigé que par une dictature, car il exige un pouvoir sans partage, capable de réprimer toutes contestations, et suffisamment puissant pour imposer ses règles aux entreprises capitalistes.

Jusqu’à présent la performance du système chinois est impressionnante. Sur les quatre dernières décennies, le PIB Chinois a été multiplié par 37, la consommation des ménages par 90, et la Chine est devenue le premier exportateur mondial de biens et de services à hauteur de plus de 2500 milliards de dollars avec un PIB national en passe de prendre la première position mondiale.

Ce système n’est possible dès lors que perdure la réalité de la croissance économique interne.

De cette croissance dépend l’acceptation par la population d’un régime aussi autoritaire, et seule cette acceptation, permet le bon fonctionnement du système, par la nécessité du maintien la paix sociale.

Cette croissance est également conditionnée à la réussite d’une hégémonie chinoise internationale car elle n’est pas soutenable, si elle se cantonne au niveau national, qui ne peut pas, à lui seul, apporter la manne nécessaire à cette croissance.

Les dirigeants chinois, qui l’ont bien compris, mènent une politique particulièrement active et agressive en matière d’expansion internationale, dont la partie la plus visible est la « Route de la Soie ».

Autrefois, l’expansion consistait à envahir un pays étranger, à s’y installer pour le coloniser en prenant les rênes de l’administration. De nos jours les technologies, les savoir-faire, l’actionnariat économique, la dirigeance s’exportent sans besoin de guerroyer. Cette nouvelle forme de colonisation, moins violente et plus insidieuse, apporte les mêmes résultats, à savoir l’étendu de sa zone d’influence et le profit.

Ce système à ses limites

Au plan national, l’amélioration du niveau de vie de sa population et l’aspect profondément inégalitaire de son évolution sont des « effets secondaires » néfastes, car les avancées économiques engendrent inévitablement une prise de conscience des méfaits inégalitaires, qui sont une source de révolte. Il faut donc une croissance performante pour masquer ces difficultés.

Pour que le projet expansionniste chinois fonctionne il faut également, qu’il soit sinon accepté, au moins supporté, par les grandes nations de ce monde, à la fois pour ne pas engager de conflits, mais aussi parce que ces nations qui observent sont aussi les gros clients des exportations chinoises, nécessaires à son développement.

Bien que les dirigeants chinois cherchent la discrétion ils ne peuvent éviter un regard international sur leurs actions de répression. Qu’il s’agisse de la normalisation chinoise sur Hong Kong, de la main mise au Tibet, de la recherche d’intégration de Taïwan, ou de la répression sur les Ouïghours, la Chine ne peut pas cacher sa volonté expansionniste par la force.

Ces défaillances visibles sont non seulement source de possibles conflits armés, mais de plus, elles marquent la Chine d’une défiance internationale, lourde de conséquences.

Taïwan, sujet explosif

La technique du « Copier-Coller », précédemment décrite, s’applique également à la géopolitique chinoise.
Les Chinois reste donc discret sur l’appui apporté à Poutine dans la guerre en Ukraine.
Ils observent le modèle et son évolution, tant il ressemble aux conditions dans lesquelles ils se trouvent face à Taïwan.


Suivant les résultats constatés et l’acceptation de la communauté internationale, ils pourront ainsi adapter leurs positions à la limite de ce qui serait acceptable.
Mais voilà, leur légendaire prudence est perturbée par un confluent de circonstances qui leur fait perdre leur lucidité, voir leur patiente.

  • La politique « zéro Covid » est un échec lamentable qui pèse sur la population chinoise et détériore l’image internationale de la Chine,
  • La forte croissance économique chinoise est en berne, son outil de production déraille.
  • En novembre 2022 se tiendra le 20ème congrès du PCC au cours duquel Xi Jinping devrait entamer son troisième mandat de chef du parti, tandis que la direction centrale du PCC sera réorganisée. Des résultats de ce congrès dépendent la poursuite de cette politique.
  • En novembre 2024 l’élection d’un nouveau président américain pourrait changer la donne. L’équilibre actuel pourrait être déstabilisé par l’arrivée d’un nouveau président, ou l’élection de l’ancien président Trump.
  • Les conditions de la fin de la guerre Ukrainienne sont incertaines. Elles pourraient entraîner des conséquences néfastes également pour la Chine.

Certainement que la réaction inhabituelle et démesurée de la Chine, face à la simple visite de Nancy Pelosi à Taïwan, s’explique par le poids de ces circonstances défavorables, qui affectent quelque peu la sérénité chinoise.

Au bord du chaos

En réplique à la visite à Taipei de la numéro trois américaine Nancy Pelosi, jugée comme une provocation par la Chine, cette dernière mène de vastes manœuvres dans six zones maritimes autour de l’île. Mobilisant avions de chasse, hélicoptères ou encore frégates, elles visent à simuler un « blocus » de Taïwan et incluent notamment « l’attaque de cibles en mer ». C’est la première fois que sont littéralement cernées ces zones de manœuvres.


Depuis longtemps évoqué, parmi les options que pourrait utiliser la Chine continentale pour conquérir l’île, le « scénario du blocus », gagne évidemment en crédibilité avec ces exercices. Un blocus aurait pour objectif d’empêcher toute entrée ou sortie de navires et d’avions commerciaux ou militaires. Mais aussi d’imposer un déni d’accès aux forces américaines stationnées dans la région. L’armée chinoise « a toutes les capacités pour imposer un tel blocus ». On voit déjà avec les exercices actuels que les avions de chasse et les navires taïwanais ne peuvent absolument pas décoller ou sortir de leurs ports. »

L’armée chinoise a tiré une dizaine de missiles balistiques qui ont frappé différentes zones maritimes autour de Taïwan. Pour la première fois, certains ont survolé l’île en mobilisant plus de 100 avions et plus de 10 frégates.

Le gouvernement américain est beaucoup plus prudent afin d’éviter l’escalade, qu’il ne souhaite pas. La prudence américaine s’explique aussi par le fait que la Chine a grandement augmenté ses capacités militaires par rapport à 1996, quand elle avait été incapable d’interdire l’accès de la zone à l’US Navy. Dans certains domaines ses capacités dépassent peut-être même celles des Etats-Unis. Si une (future) bataille est confinée dans une zone directement autour de Taïwan, alors la marine chinoise sera un adversaire de taille. Et si les Américains et les Japonais n’interviennent pas, les choses seront très difficiles pour Taïwan.

On observe les conséquences mondiales d’un simple blocus des exportations de blé ou de maïs ukrainien, ou bien l’énorme inquiétude des occidentaux européens, à imaginer une fermeture du robinet du gaz russe cet hiver.

On peine à imaginer qu’un blocus économique de Taïwan, qui produit et exporte 75% des micro-processeurs, déstabiliserait, sans délais, toute l’économie mondiale. Tous les secteurs de production seraient touchés, en toute partie du monde, y compris la Chine elle-même, sans possibilité de compensation rapide.

Il est évident que les Chinois seraient dans l’obligation, sauf à voir leur économie s’effondrer, de s’approprier la production technologique taïwanaise, par la force. Le monde ne pourrait, pour des questions cette fois de survie, que réagir.
A côté de cela, le drame Ukrainien, n’apparait que comme un « petit conflit local ».

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