Tartufferie et compagnie…

Par Alain.

Je ne sais pas vous, mais moi je m’inquiète de la survie des théâtres parisiens face à une nouvelle concurrence qui risque fort de porter un coup fatal à cet artisanat scénique, spécificité de notre capitale. En effet, sur décision de notre bien-aimé président, un nouveau lieu de spectacles vient d’être créé, et ce, dans un endroit stratégique du VIIème arrondissement.

L’Etat a mis les moyens : cinq cent soixante-dix-sept acteurs sont engagés, tous non professionnels… mais néanmoins pas bénévoles. Plusieurs troupes ont été constituées afin de favoriser les différentes expressions orales, charge à chacune de faire éventuellement évoluer la version initiale des textes mis à sa disposition. En lever de rideau, nos responsables ont décidé de frapper fort  en reprenant le grand classique de Molière : Tartuffe. Conscients cependant qu’il convenait de renouveler le genre en lui apportant une touche de modernité, toute l’équipe a travaillé dur afin d’adapter cette nouvelle formule. Après moult propositions, notre président a proposé – sous les applaudissements – son nouveau titre : « tartuffe ou les affres de l’immigration ».

Les répétitions sont allées bon train et l’Elysée, pressé d’offrir ce grand spectacle, a ordonné à sa propre troupe de frapper les trois coups. Las, là où l’on s’attendait dans les hautes sphères à un engouement des spectateurs applaudissant à tout rompre, on récolte un superbe bide du fait de l’incompréhension totale de cette interprétation, véritable usine à gaz, dont le scénario abscons semble même échapper à son créateur pourtant spécialiste de la phrase tordue.

Il faut cependant reconnaître que l’organisation de cette pièce laisse quelque peu à désirer ; chaque troupe joue en fait sa propre partition, au dépens de celle des autres, et uniquement dans le but d’emmerder ces derniers :

  • La compagnie « Renaissance avant la mort » tient à respecter le texte que le patron lui impose… bien qu’elle soit prête à quelques concessions… encore que certains menacent de ne pas jouer avec les copains si l’on change une ligne du scénario…  D’ailleurs un coproducteur, accessoirement Ministre de la santé vient de rendre sa blouse, estimant que certains passages ne sont pas en adéquation avec ses pensées.
  • La « Dupe de gauche » n’est, comme à son habitude, d’accord sur rien et rejette en bloc la représentation, refusant de jouer avec ceux qui n’acceptent pas sa propre ligne héritée d’une longue tradition démocratique.
  • Bien entendu, les quelques acteurs dirigés par le conducteur de tracteur ne se mouillent pas, veillant surtout à ne vexer personne au cas où une dissolution pointerait le bout de son nez.
  • La célèbre formation du « Circo Erico Ciotti », bien que peu nombreuse, mais plus rusée que les autres, impose à tous son texte adroit qui finira, tant bien que mal, par réunir tous les suffrages.
  • Quant à la troupe « La Joyeuse Francisque » elle rit sous cape en proposant des modifications qu’elle retire puis réintègre, promet de jouer, puis se désiste… pour finalement donner le baiser de la mort et participer quand même, histoire d’ajouter un peu de brouillard à la purée de pois ambiante.

Tout ceci serait sans doute fort amusant s’il ne s’agissait que de théâtre, mais, malheureusement, c’est la représentation nationale qui nous offre ce spectacle affligeant, digne des pires heures de la quatrième république. Au train où vont les choses, il ne restera bientôt à notre Président qu’une fonction : inaugurer les chrysanthèmes !

Heureusement, un beau cadeau de Noël, lueur d’espoir dans cette noirceur, nous arrive ce jour : l’inénarrable Jack, quatre-vingt-quatre ans, est reconduit pour quatre longues années dans sa fonction de Président de l’Institut du Monde arabe, où il pantoufle depuis déjà dix ans. « La vieillesse est un naufrage » disait de Gaulle… pas pour ceux qui savent surnager !

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